Infirmiers libéraux : si c'était à refaire, c'est "oui" !

Ils sont fiers et attachés à leur métier et pourtant, l'évolution de la société, les attentes des patients, l'émergence des nouvelles technologies, les évolutions réglementaires et les politiques de santé impactent nécessairement leur manière d’exercer et d’envisager l’avenir. Les infirmiers libéraux expriment dans cette 7e édition de l'Observatoire CMV Médiforce des professions libérales de santé un fort sentiment d’utilité, le fait de trouver que leur métier est « très stimulant au quotidien » et que malgré les difficultés « si c’était à refaire ils choisiraient le même ».  

infirmière libérale, maletteFierté (90 %), liberté d’exercice (89 %), sentiment d’utilité (87 %), vocation (83 %) : autant de composantes positives liées à leur métier qui rassemblent à l’unanimité les professionnels de santé libéraux (PLS) interrogés à propos de leur métier. Les conclusions données par CMV Médiforce1 soulignent que si la rémunération est évoquée spontanément comme un facteur positif et une raison donnée à son prosélytisme, elle est toutefois toujours moins bien citée que l’amour du métier et sa liberté ! Plutôt rassurant, non ? Alors bien sûr, il n'y a pas que du positif et la morosité n'est jamais loin lorsque l'on aborde les contraintes administratives liées à l'exercice : ils sont alors 74 % à indiquer qu'elles sont très importantes et responsables du fait de ne plus vraiment faire son métier. De la même façon, l'équilibre vie professionnelle/vie personnelle est un facteur de qualité de vie important. 70 % des PLS déclarent d'ailleurs souhaiter se consacrer moins à leur métier et davantage à leur vie privée. Enfin, 67 % d’entre eux estiment que leur métier rapporte peu par rapport à la charge de travail.

"Spontanément, ce qu’on valorise dans sa profession en libéral, c’est le beau métier et la liberté…"

Quid des infirmiers libéraux

Cela n'étonnera personne, dans le contexte actuel, ils l'ont exprimé à maintes reprises, peinant à trouver leur place dans les politiques de santé en cours ou à venir. Les infirmiers libéraux sont engagés mais souffrent d’un manque de reconnaissance. Cependant, selon les résultats de cet Observatoire, quand il s’agit de donner une note à la vision actuelle ou future de sa profession, les infirmiers se situent aujourd’hui dans la moyenne générale. Ils sont même les plus nombreux à donner une très bonne note (8 à 10) à la situation actuelle de leur profession (15 % vs 8 % en moyenne). D’un côté les infirmiers voient de manière positive les changements du contexte politique et semblent plus ouverts que d’autres aux scénarios d’évolution du système de santé. Soulignons qu'avec les pharmaciens, ce sont les professionnels les plus favorables aux différentes mesures gouvernementales envisagées. D'un autre côté, ils paraissent relativement absents des transformations liées au développement de la e-santé par exemple. Les infirmiers sont ainsi parmi les moins utilisateurs de ces nouvelles pratiques. Leurs réticences face à la e-santé sont les mêmes que celle de la moyenne des professionnels interviewés, à une exception significative : 87 % d’entre eux estiment que la e-santé n’est pas adaptée à [leurs] patients, qui sont peu équipés eux-mêmes (vs 66 % en moyenne).

Charge de travail versus revenus

Je trouve que mon métier rapporte peu par rapport à ma charge de travail (51 % de « tout à fait » vs 34 % en moyenne) occupe la 4e place chez les infirmiers, presque au même niveau que celui d’être fier de son métier, ou la valorisation de la liberté d’exercice, l’indépendance, ou encore de leur sentiment d’utilité j’apporte grâce à mon métier une contribution réelle à la société (ils sont respectivement 93 %, 92 % et 89 % au total à le dire, dans la moyenne des interviewés).

Un beau métier à recommander ?

Recommande-t-il pour autant d'exercer leur profession ? Les résultats le soulignent, de tous les professionnels de santé interviewés, ce sont les plus nombreux à dire qu’ils recommanderaient à un jeune d’exercer leur profession en libéral : 35 % (vs 22 % en moyenne) disent qu’ils le feraient certainement ou très certainement. Si on y rajoute ceux qui répondent probablement, on obtient 65 % de prosélytes en leur sein (vs 53 % en moyenne). Ils évoquent au premier chef la liberté que leur mode d’exercice leur procure (dont une petite moitié sous l’angle de l’absence de hiérarchie et un tiers sous l’angle de la liberté de ses plannings et horaires ou de la qualité de vie que cela procure). Près d’un sur deux (46 %) évoque le métier lui-même, de manière dominante via les relations avec les patients, comme raison de leur prosélytisme. Bien entendu, certains interviewés invoquent parfois tout cela.

"C’est un stress permanent, beaucoup de choses reposent sur nous"

Infirmiers, ce qu'ils disent de leur exercice libéral

  • La liberté, pas de hiérarchie (H 41 ans, Aisne).
  • Pour l’instant on est encore autonome, c’est agréable de ne pas avoir de chef. (F 67 ans, Tarn).
  • Liberté du planning des jours travaillés. (F 37 ans, Tarn)
  • Il y a davantage de liberté dans ses choix professionnels, des avantages sur l’organisation entre le travail et la vie personnelle. (F 43 ans, Finistère).
  • Un travail plus autonome, sans supérieur hiérarchique. Avec plus de liberté dans les plannings et les horaires. (F 37 ans, Hérault).
  • De plus en plus de travail et de temps de travail pour de moins en moins de gains, beaucoup d’administratif à faire au détriment du contact avec le patient. (F, 58 ans, Paris).
  • Pas de reconnaissance (sauf des patients et encore…) de nos instances : revenu minable, nomenclature inadaptée aux soins actuels, pas de vie de famille (permanence des soins 24/24 7j/7), solitude dans les prises en charge, pas de coordination avec les médecins encore moins avec l’hôpital. (H 52 ans, Lot)

Tournés vers les patients et leurs besoins

Leur souci des patients se traduit par le fait qu’ils sont les plus nombreux (46 % vs 33 % en moyenne) à souhaiter le scénario de « la prise de pouvoir par les patients militants ». En effet, souligne CMV Médiforce, via le développement des réseaux sociaux et des technologies de l’information, on assiste à la montée en puissance de communautés de patients et à l’intervention de « citoyens » de plus en plus informés dans le système de santé : notation des professionnels, prescription « pair à pair », promotion virale de médecines alternatives…) ce qui n'est pas sans incidence sur la relation soignant/soigné.

Gardons en tête que pour les infirmiers libéraux, malgré les difficultés et autres problématiques liées à l'exercice, leur métier est très stimulant au quotidien et que si c’était à refaire ils choisiraient le même. Qu'ils le sachent, et c'est prouvé, prendre soin des autres rend beau !

Note

  1. Source : Observatoire CMV Médiforce des Professions Libérales de Santé 2018” CMV Médiforce a créé en 2011 le premier Observatoire dédié aux Professions Libérales de Santé. Dans le cadre de cette 7ème édition, CMV Médiforce et l’institut Vision & Talents ont réalisé, du 27 octobre au 17 novembre 2017, une enquête quantitative auprès de 483 Professionnels Libéraux de Santé, répartis en 8 professions : biologistes, chirurgiens-dentistes, infirmiers, kinésithérapeutes-ostéopathes, médecins généralistes, pharmaciens, radiologues, vétérinaires.

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern