"Quelle satisfaction de voir un patient sortir en marchant !" : IDE en SSR, vers l’épanouissement professionnel ?

Le secteur des soins de suite et de réadaptation offre aux infirmiers des modalités d'exercice variées. Avec une logique de soins différente de celle des services aigus, un travail en équipe pluridisciplinaire particulièrement développé et des soins infirmiers combinant technicité et relationnel, ce secteur stratégique dans l'offre de soins vaut à être connu… d'autant que près d'un tiers de ses effectifs (personnel non médical) sont des infirmiers.

Étudiants infirmiers et élèves aides-soignants autorisés à exercer avant délivrance de leur diplôme

 

Ce n'est pas un scoop : les services de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO) captent une large majorité des emplois d'auxiliaires médicaux (66 %), dont les infirmiers, et il en est d'ailleurs tout autant s'agissant des médecins. S'ensuivent le secteur de la psychiatrie et celui des SSR (respectivement 15 % et 14 %). Si cette répartition [des personnels non médicaux salariés, NDLR] est très stable depuis 2013 1, la FHP SSR – le syndicat des SSR – note cependant que le secteur continue de croître étant donné les besoins de soins liés aux maladies chroniques, aux événements de santé invalidants et au vieillissement de la population, ce d'autant que les durées moyennes de séjour (DMS) en médecine et en chirurgie diminuent. Ainsi, ce secteur offre-t-il des opportunités d'emploi, notamment aux infirmiers, qui représentent près d'un tiers des effectifs non médicaux, lesquels peuvent exercer soit dans des SSR polyvalents – où les profils de patients sont plutôt gériatriques – soit dans des SSR spécialisés où les profils sont encore aptes à faire de la réadaptation.

Spécificités des SSR

Pour rappel, l’activité de SSR vise à prévenir ou réduire les conséquences fonctionnelles, physiques, cognitives, psychologiques ou sociales des déficiences et des limitations de capacité des patients, et à promouvoir leur réadaptation et leur réinsertion. Les soins s'effectuent fréquemment à la suite de lésions traumatiques, de pathologies cardiovasculaires, de syndromes paralytiques ou d’arthropathies, en suites postopératoires… Outre la nature de leur activité, la spécificité des SSR tient dans la DMS, bien supérieure à celle rencontrée en MCO. Celle-ci oscille ainsi de trois semaines à trois mois, sachant qu'elle peut aller bien au-delà : C'est plutôt davantage trois mois minimums pour un AVC, voire un an pour un trauma crânien ; en fait tant qu'il y a de la récupération estime Catherine Cadu, présidente de l'association des infirmiers en rééducation et réadaptation (AIRR). Autre spécificité des SSR : la pluridisciplinarité, très prégnante. L'infirmier collabore en effet avec d'autres soignants, entre autres masseurs-kinés (rééducation motrice), ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, diététiciens… s'agissant de la réadaptation.

SSR : des établissements et des hommes

  • 1 625 établissements, dont 42 % en secteur public, 29 % en secteur privé commercial et 29 % en secteur privé d'intérêt collectif
  • Activité plus développée en Ile-de-France et en Paca, Occitanie et Corse
  • 32,8 millions de journées d’hospitalisation complète (dont 12,7 millions dans le public)
  • 4,6 millions de journées d’hospitalisation à temps partiel (plus développée dans le secteur privé commercial puis le privé d'intérêt collectif)
  • 1 million de patients hospitalisés
  • Près de 110 000 ETP non médicaux :
    • 1/3 d’infirmiers (soit 33 000 environ)
    • 1/3 d’aides-soignants
    • personnels de rééducation (masseurs-kinés, orthophonistes, ergothérapeutes, psychomotriciens, diététiciens (1/3)
    • autres personnels (administratif, technique et médico-technique, psychologues, éducatif, assistants de service social)

Variété des missions et épanouissement

Rattachés à la direction des soins et au cadre de santé du service, les infirmiers ont des missions diverses qui peuvent varier sensiblement selon la nature de l'activité des établissements. Cependant, celles-ci consistent dans leur ensemble à évaluer l'état de santé et le degré d'autonomie des patients, effectuer et formaliser le diagnostic infirmier et décider de la réalisation des soins relevant de leur initiative, effectuer les soins infirmiers et les activités thérapeutiques adaptés aux situations en respectant les protocoles d'hygiène et les règles de bonnes pratiques, identifier les situations d'urgence ou de crise et y faire face par des actions adaptées ; mais aussi participer au retour à l'autonomie des patients, assurer le suivi des soins prodigués et évaluer la douleur (en postopératoire notamment), transmettre les informations, accompagner les patients et leurs familles. Les infirmiers y prodiguent des soins techniques (perfusions, pansements simples et complexes, mesure des paramètres vitaux, électrocardiogramme, aérosolthérapie, pose et surveillance de voie veineuse périphérique, surveillance des drains…, NDLR) mais le volet relationnel est par ailleurs très important pour l'accompagnement et la recherche d'autonomie des patients observe Jean-Charles Erny, directeur des soins, de la qualité et de la gestion des risques au centre Richelieu (Croix-Rouge française, La Rochelle), dont l'activité principale concerne les soins de suite et de réadaptation spécialisés. Ce que confirme Catherine Cadu : Le soin relationnel est en effet très présent ; d'autant que les DMS sont plus longues et que les patients font souvent face à de multiples deuils (suite à une amputation…). Les infirmiers travaillant dans ces services affinent leur capacité de communication, mais ont aussi une attention plus soutenue afin de tendre vers une prise en charge qui soit la plus holistique possible.

Des missions variées propices à un certain épanouissement professionnel des soignants en poste

Par ailleurs, poursuit Jean-Charles Erny, les infirmiers y sont aussi investis – plus qu'en MCO sans doute – dans des programmes d'ETP (par exemple BPCO, AVC, troubles périnéo-sphinctériens, lombalgies chroniques…) dans lesquels ils réalisent des diagnostics éducatifs et animent différents ateliers. Lors du retour à domicile, les infirmiers en SSR peuvent également être amenés à s'y déplacer à la demande d'un professionnel de santé libéral et avec l'accord des patients via des équipes mobiles (composées selon les établissements d'un IDE coordinateur, d'un médecin, d'une assistante sociale, d'un neuropsychologue…) remarque la présidente de l'AIRR. Autant de missions variées propices à un certain épanouissement professionnel des soignants en poste, ce d'autant que la rééducation vise à "aller vers le mieux" : Quel plaisir, quelle satisfaction professionnelle de voir un patient sortir en marchant, autonome s'enthousiasme ainsi Catherine Cadu.

 

SSR, dans quels cas ?

  • 9 spécialités adultes, 7 spécialités enfants
  • Prises en charge les plus courantes :
    • maladies de l'appareil locomoteur (pose de prothèse pour arthrose du genou, fracture de l'extrémité supérieure du fémur, prothèse pour arthrose de hanche, autres fractures du membre inférieur/405 000 patients)
    • maladies de l'appareil neurologique (post AVC, maladies d'Alzheimer et autres démences/199 000 patients)
    • maladies de l'appareil cardiovasculaire (insuffisance cardiaque, cardiopathies ischémiques/133 000 patients)
    • maladies de l'appareil respiratoire (65 000 patients)
    • tumeurs malignes (64 000 patients)
    • affections endocriniennes, métaboliques et nutritionnelles (obésité…/62 000 patients)
    • troubles mentaux et comportementaux (57 000 patients)
    • affections des organes digestifs (38 000 patients), soins palliatifs (34 000 patients)
  • Les patients en SSR sont globalement âgés (50 % ont 70 ans ou plus)

Sources : Atih – données issues du PMSI SSR 2019 ; Les établissements de santé, Drees, édition 2020 (chiffres de 2018)

Profil recherché

Au vu du profil des patients pris en charge, les infirmiers désireux exercer leur métier dans ce type de services doivent avoir une certaine appétence pour le contact avec les personnes âgées (la moitié des patients ont 70 ans ou plus) et idéalement déjà une expérience de prise en soins des personnes handicapées et/ou dépendantes en services de chirurgie ou médecine par exemple. Reste que l'absence d'expérience n'est pas rédhibitoire pour peu que la motivation soit là assure Jean-Charles Erny, qui constate que certains infirmiers postulent au détour d'un stage ou d'une première expérience en CDD. Ils doivent aussi disposer d'un bon sens de l’organisation, car en SSR il faut savoir travailler de façon synchronisée avec les autres auxiliaires médicaux pour une coordination optimale du parcours patient. Bon relationnel, rigueur, ou encore sens des priorités sont également de mise. Tout comme un esprit d'équipe et collaboratif, étant donné que les IDE en SSR sont bel et bien les pivots et relais de l'équipe pluridisciplinaire, ceux qui font le lien entre le médecin, les personnels de rééducation/réadaptation, le plateau technique et les autres services.

1 - Source : Les établissements de santé, Drees, édition 2020 (chiffres de 2018).

Données exprimées en équivalent temps plein, arrêtées au 31/12/2018

Note concernant la formation

Le DEI suffit en lui-même. Des formations complémentaires peuvent toutefois venir enrichir la formation de base, tels que le DU sur les traumas crâniens ou celui sur les Soins infirmiers en rééducation-réadaptation (DUSIRR), ou ceux en rééducation réadaptation, soins palliatifs et accompagnement, prise en charge de la douleur, éducation thérapeutique…

Valérie HedefJournaliste