La réintégration des soignants non vaccinés contre le Covid-19 effective depuis le 14 mai 2023

Selon le décret publié le 13 mai 2023 faisant suite à une instruction ministérielle, les soignants non vaccinés contre le covid19 peuvent réintégrer leurs services depuis le 14 mai. Histoire de cette décision et marche à suivre pour les établissements de santé.

Réintégration des soignants non vaccinés contre le Covid-19L’Assemblée nationale a adopté en première lecture, le 4 mai dernier, un texte abrogeant l’obligation de vaccination anti-Covid pour les professionnels de santé et les étudiants en santé (1). La proposition de loi du député du groupe communiste Jean-Victor Castor (Guyane), présentée dans le cadre de la journée parlementaire réservée aux textes de son groupe, a été adoptée par 157 voix contre 137, contre l’avis du gouvernement qui aurait préféré une simple « suspension ». La proposition de loi abroge donc l'obligation faite aux personnels soignants, y compris les étudiants, ou en contact avec des personnes vulnérables (agents administratifs, aides à domicile, sapeurs-pompiers, ambulanciers...) de se vacciner contre le Covid-19. Le ministre de la santé et de la prévention François Braun a déploré un « message regrettable envoyé par cette Assemblée aux soignants », qui va « affaiblir notre capacité de réponse » en cas de nouvelle épidémie.

« Fin 2021, la France avait imposé une obligation vaccinale à près de 2,7 millions de personnes, soignants, mais aussi agents des hôpitaux et des maisons de retraite, ambulanciers, aides à domicile ou encore pompiers. En mars 2023, le ministère de la Santé estimait ainsi qu'"autour de 0,3%" des agents hospitaliers avaient été suspendus pour avoir refusé l'obligation vaccinale. Cependant aucun chiffre précis n’est actuellement disponible… »

Rester néanmoins vigilant…

Le gouvernement avait cependant annoncé sa volonté de réintégrer les soignants non vaccinés, après un avis émis en ce sens par la Haute Autorité de santé (HAS) le 30 mars dernier (2) qui précisait que « cette préconisation de lever l’obligation de vaccination contre la Covid-19 ne constituait en rien une remise en question de ses précédents avis et recommandations rendus dans des contextes sanitaires et épidémiques différents ». La Fédération hospitalière de France déclarait également à ce sujet « prendre acte » de l’avis favorable de la HAS pour la réintégration des soignants non-vaccinés, mais « continuer de fortement recommander la vaccination à ses agents », rappelant ainsi « toute l’importance de la vaccination, en particulier pour les personnes à risque et les professionnels », et demandant « une vigilance constante afin de rester attentif aux potentielles mutations du virus. » Le Sénat n’a pas encore rendu son avis sur cette proposition de loi et le gouvernement garde la possibilité de suspendre à nouveau les non-vaccinés si la pandémie repart, par un nouveau décret.

Une entrée en vigueur des modalités de réaffectation des agents depuis le 14 mai 2023

Une instruction ministérielle, datée du 2 mai 2023 relative aux modalités de réaffectation des agents - Agents de la fonction publique hospitalière - salariés des établissements de santé et médico-sociaux - à la suite de la levée de l’obligation vaccinale contre la COVID-19 (3) précisait que les professionnels de santé et les étudiants seraient considérés comme réintégrés « le lendemain » de la parution du décret officialisant cette levée de l’obligation vaccinale anti-covid19 ; décret paru au Journal Officiel le 14 mai 2023.

« Il appartient dès lors aux employeurs de donner la possibilité aux personnels concernés de reprendre une activité professionnelle. S’agissant des personnels libéraux, la fin de la suspension est automatique ».

En pratique, les chefs d’établissements publics (hôpitaux, Ehpad…) devront « au plus tôt, et si possible dans un délai de deux semaines, contacter chaque professionnel suspendu pour lui signifier la fin de la suspension et, si possible, lui indiquer le poste d’affectation et la date de reprise du travail ». Lorsque l’établissement est en mesure d’informer l’agent de son affectation et de sa date de reprise, la décision d’affectation comportant une indication des voies et délais de recours devra accompagner ce courrier, notamment s’il n’est pas prévu de convoquer l’agent préalablement pour évoquer l’affectation envisagée. Est annexé à l'instruction, un modèle de courrier à adresser aux agents suspendus concernant les modalités de reprise des fonctions, dès l'entrée en vigueur de la fin de l'obligation vaccinal au Covid-19.

L’instruction énumère la procédure à suivre et les différents moyens pour résoudre les situations dans lesquelles le retour de l’agent s’avère impossible ou non souhaité par lui. Cette instruction s’applique sans spécificité aux collectivités d’outre-mer. Il y est rappelé que les périodes de suspension :

- n’ont pas généré de droits à congés ;
- n’ont pas été prises en compte comme périodes ouvrant des droits à l’avancement ;
- n’ont pas été prises en compte pour la constitution des droits à pension.

Par principe, l’agent suspendu a le droit de reprendre ses fonctions sur le poste qu’il occupait ou sur un emploi équivalent. « Dans l’hypothèse où l’établissement d’origine aurait une difficulté pour réaffecter l’agent suspendu sur un emploi équivalent au sein de l’établissement, aucun changement d’établissement ne peut être imposé. En revanche, un agent peut décider de quitter son établissement d’origine pour être recruté dans un autre établissement. » Et l’instruction de préciser que « dans l’hypothèse où la perspective de réaffectation d’un agent suspendu suscite des troubles au sein du service, un changement d’affectation dans l’intérêt du service peut être envisagé ». Il est enfin rappelé que si le retour de l’agent « s’avère impossible ou conflictuel, par exemple en cas de désaccord avec l’affectation qui lui a été notifiée ou d’impossibilité de trouver une nouvelle affectation correspondant à son grade, il reste possible de convenir d’une rupture conventionnelle. »

Une visite médicale de réintégration par les services de santé au travail, non obligatoire sur un plan réglementaire, est encouragée afin de s’assurer que l’ensemble des conditions nécessaires au retour de l’agent sont bien réunies.

« Il est rappelé que les périodes non travaillées au regard de la suspension pour non-respect de l’obligation vaccinale ne peuvent donner lieu à aucune rémunération. »

Une évaluation du dispositif via une enquête nationale SOLEN sera adressée aux établissements pour procéder à l'évaluation quantitative de la réintégration des professionnels visés. Une première remontée est envisagée au mois de juin 2023. Ce retour des personnels non vaccinés s'annonce sur le terrain hautement délicat à mettre en œuvre et à faire accepter des personnels vaccinés.  

« Pour les professionnels de santé libéraux La levée de l’obligation ne valant qu’à partir de son entrée en vigueur, les professionnels suspendus qui auraient continué à exercer pourront ainsi toujours être poursuivis pour avoir exercé illégalement leur activité au titre de la période pendant laquelle l’obligation vaccinale était en vigueur. »

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Bernadette Gonguet