Fabien et Manuela, infirmiers militaires au service de la France

Parce qu'ils sont rarement valorisés, parce que leur engagement et leurs missions sont souvent passées sous silence, ces deux portraits lèvent une partie du voile. Infirmiers militaires ils sont et fiers de l'être ils l'affirment.

Fabien, infirmier de commando Marine

militaire parachuteAttiré par un métier d’action dans le domaine de la santé, l’ICN Fabien s’engage dans la Marine nationale en 1998 puis intègre l’EPPA pour devenir infirmier des commandos de Marine. Diplôme d’état en poche en 2001, parachutiste, puis chuteur opérationnel et moniteur national de secourisme, il est affecté au commando Jaubert puis Trepel.

Le métier d’infirmier de commando est particulier : il faut à la fois être efficace, comme tout opérateur dans un groupe, et apporter la plus-value du soignant, attendue par nos camarades commandos. Cela induit de s’entraîner avec les groupes pour être opérationnel et efficace, sans oublier de maintenir ses connaissances techniques pour avoir des gestes sûrs, notamment dans l’urgence, en zone isolée ou hostile : Afghanistan, Sahel, Centrafrique, Djibouti, narcotrafic, police des pêches en zone guyanaise, lutte contre la piraterie en zone Atalante. Sur l’ensemble de ma carrière depuis mon engagement, mes années au sein du groupe de contre-terrorisme et de libération d’otages restent les plus marquantes. J’y ai trouvé un esprit de groupe qui m’est cher, allié à des qualités techniques très spécifiques, exercées au quotidien dans un souci d’excellence. Cependant, durant ces années, j’ai imposé à ma famille mon rythme et mes départs en mission, parfois avec un préavis très court, de quelques heures, avec le stress et les difficultés qui en découlent pour eux. Des qualités pour faire ce métier ? Je dirais, en tout premier lieu, d’humilité, de pugnacité, et aussi du devoir de mémoire : certains de mes camarades1 n’ont pas eu la chance de rentrer de mission et ont été jusqu’au sacrifice ultime.

Note

  1. Maître-principal Frédéric PARÉ, infirmier des commandos de Marine, décédé en Afghanistan le 25 août 2006

Manuela, un être bienveillant pour les blessés

militaires avionL’infirmière de classe supérieure (ICS) Manuela est infirmière au centre médical de Villacoublay, chargé du rapatriement sanitaire des militaires blessés en opérations. Les 16 évacuations médicales qu’elle a réalisées l’ont confortée dans son choix de soutenir ses camarades au plus près du terrain.

Pristina, Ouagadougou, Bamako, Libreville, Abidjan, Tripoli, Djibouti, autant de lieux où je me serai rendue au cours de cette année pour évacuer des camarades au plus mal, malades, blessés, polytraumatisés. Paludisme, infarctus du myocarde, AVP, toutes ces pathologies m'ont amenée à recevoir un coup de fil au beau milieu de la journée ou plus souvent de la nuit. Le décompte commence 180 minutes avant le décollage, le temps nécessaire pour me rendre à Villacoublay, checker le matériel d’évacuation médicale, le  transporter et le mettre en condition dans l’avion. Les Falcon se transforment en « hôpital volant » avec une ou deux civières, pour ramener, en moins de 24 h d’un théâtre d’opération, un ou plusieurs patients, préalablement stabilisés dans une antenne chirurgicale. Avec le médecin et le convoyeur de l'escadrille aérosanitaire (parfois renforcés d'un réanimateur), nous sommes présents auprès du patient pour pallier les complications qui surviendraient au cours du vol, jusqu’à notre arrivée à l’hôpital militaire en métropole. Lors de mon dernier vol, j’ai pris en charge un militaire victime d'une piqûre de scorpion, en choc cardiogénique avec une fraction d’éjection à 20%. Mon rôle : surveillance des voies (artérielle, veineuse centrale, veineuse périphérique), de la fréquence cardiaque, des apports, de la diurèse, autant de gestes d’une technicité inhabituelle en unité, prodigués dans la cellule confinée d’un aéronef. Les moments partagés en équipe réduite lorsqu’une situation compliquée est maîtrisée, ou avec le patient, en l’assistant dans des gestes simples, resteront gravés à jamais. Ma motivation : le regard de ces patients rapatriés, rassurés, reconnaissants. La spécificité de mon métier : une tenue de vol comme tenue de soignant, un matériel technique de pointe, l'absolue nécessité de perpétuellement se remettre à niveau dans ses connaissances professionnelles. Après 18 années de service, je reste un « être bienveillant » qui traverse les cieux pour ramener les corps blessés ou malades, là où l'on pourra prendre soin d'eux.

Merci au Capitaine Sandra MARCON, Adjointe de la communication du Service de Santé des Armées qui nous a transmis ces portraits.