Important turnover des soignants dans le bassin genevois

L’observatoire transfrontalier des personnels de santé vient de publier son deuxième rapport. Créé il y a deux ans en partenariat entre l’Agence Nationale de Santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes et le Département de la Sécurité, de l’Emploi et de la Santé du canton de Genève, cet observatoire comptabilise les données concernant les établissements publics du champ sanitaire et sur les deux métiers les plus impactés par le fait d’être en zone frontière : infirmier et aide-soignant.

Les effectifs des soignants entre la France et la Suisse ont été analysés par l’Observatoire transfrontalier des personnels de santé qui vient de rendre son rapport. Dirigé par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes et le Département de la Sécurité, de l’Emploi et de la Santé du canton de Genève (DSES), cette institution fait le point sur la balance de l’emploi de la région et sur les mesures mises en place par les acteurs français et suisses pour retenir les jeunes diplômés.

En 2016, plus de 6 300 infirmiers et 2 800 aides-soignants exerçaient dans les huit établissements impliqués dans l’étude (sept sont situés en France* et un en Suisse : les Hôpitaux Universitaires de Genève). En ce qui concerne plus spécifiquement les infirmiers, ils étaient 2738 à être salariés côté français en 2016 contre 2245 en 2015. De même, on constate 36 postes d’infirmiers supplémentaires (les recrutements ayant été plus important que les départs). En revanche, le turnover a augmenté passant de 20% à 28% alors que du côté helvétique celui-ci demeure stable et relativement faible (4%).

En parallèle, du côté des aides-soignants, ils étaient 1714 à travailler côté Français contre 1443 l’année précédente. Cependant, à l’inverse des infirmiers, on constate une réduction de 43 postes (plus de départs que de recrutement) et toutefois, une chute du taux de turnover qui passe de 27% à 18%. Aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), là encore ce taux stagne à 1%.

Ainsi, les établissements de santé français doivent parfois remplacer près d’un tiers de leurs effectifs pour faire face à ces rotations. Un phénomène particulièrement marquant chez les infirmiers non spécialisés. En outre, la hausse du nombre de soignant est à relativiser étant donné que certains hôpitaux n’avaient pas répondu à l’enquête en 2015.

Par ailleurs, le rapport suggère que la grande vacance des postes en France serait associée au calendrier des sorties d’instituts de formation des nouveaux diplômés. Quant aux départs, ils seraient principalement dus à l’arrivée de l’âge de la retraite pour les infirmiers alors que pour les AS, il s’agirait surtout de demandes de mise en disponibilité. A souligner néanmoins que le nombre de démissions a diminué en 2016 par rapport à 2015.

Turnover des soignants dans le bassin genevois

En 2016, 28% de rotation pour les postes infirmiers dans les établissements français frontaliers avec la Suisse

Les soignants exerçant en suisse sont surtout des transfrontaliers

Selon l’enquête de la Direction Générale de la Santé (DGS suisse), 52% des diplômes du personnel employé en 2017 (toutes catégories confondues) est d’origine étrangère. Une proportion qui demeure stable puisqu’ils étaient 53% l’année précédente. Cette très légère baisse serait la conséquence du principe de primauté cantonale à l’embauche appliqué par Genève, c’est-à-dire que, à compétences égales, ils doivent privilégier l’embauche de soignant habitant dans le canton face à ceux résidant en France voisine ou dans un autre canton.

Toutefois, les HUG ont comptabilisé leurs personnels français titulaires et il se trouve que 2352 infirmiers français ont été recensés en septembre 2017 représentant 63% des postes permanents dans l’établissement. Apparemment, une écrasante majorité d’entre eux (90%) vivent en Haute-Savoie.

Le cannibalisme infirmier de la Suisse qui va chercher ses soignants ailleurs pour combler son déficit

Des mesures pour rester attractifs

Pour limiter les départs et réduire les turnover, les hôpitaux français ont mis en place plusieurs mesures afin de se rendre plus attractifs et fidéliser les nouveaux diplômés. En amont, par exemple, une allocation d’études à hauteur de 800 euros par mois pendant deux ans maximum est prévue par contrat à condition d’exercer par la suite dans l’établissement pendant le même lapse de temps qu’a duré le versement. De même, des actions internes sont organisées afin d’accompagner la prise en poste.

Du côté genevois, les mesures portent davantage sur le renforcement de la formation et sur la création de deux nouvelles professions intermédiaires afin de pallier le manque de personnel et suppléer les infirmiers pour certains actes techniques : l’assistant en soins et santé communautaire (une qualification intermédiaire entre aide-soignant et infirmier) et le technicien de salle d’opération.

Pour en savoir plus :

Notes

*Les 7 établissements français participant à l’étude : le centre hospitalier Annecy-Genevois (CHANGE), le centre hospitalier Alpes Léman (CHAL) à Contamine-sur-Arve, les hôpitaux du Pays du Mont-Blanc (HPMB) à Sallanches, les hôpitaux du Léman (HDL) à Thonon les-Bains, l’Établissement public de santé mentale (EPSM) de la Roche-sur-Foron, le centre hospitalier de Reignier (à vocation gériatrique), le centre hospitalier du Pays de Gex (à vocation gériatrique).

Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com  @roxane0706